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L'expression, soeur de la logique 

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Présentation 

Cet article déplie la parenté de structure qui unit parole et geste scénique (instrumental, vocal, chorégraphique). Cette analogie fait notamment du sens un effet second de la structure signifiante. Nourri de pratiques, il a été pensé à l’adresse - non exclusive -  des étudiants du Conservatoire National Supérieur de Musique et de Danse de Paris. 

Introduction

Comme Kleist le rappelle dans son article de 1805, c’est en parlant que la pensée s’élabore. Voilà qui rompt avec une certaine lecture de l’adage classique de Boileau, selon lequel « ce que l’on conçoit bien s’énonce clairement et les mots pour le dire arrivent aisément ». On peut dire au contraire avec Kleist qu’on pense parce qu’on parle. La pensée se dé-couvre à mesure qu’elle s’énonce, portée par une parole, dont le tranchant ne cesse d’être affûté par ce qu’elle dévoile. Le sens est toujours du registre de l’après-coup, lui et son cortège d’effets, non sans incidence sur la suite de ce qui va se dire. Dire que le sens est second, c’est rappeler qu’il n’y a pas d’énoncé sans énonciation. Il n’y a pas de dit sans le risque du dire. Et le dire est du côté de l’agir.  

 

Le geste de qui joue, chante, dirige et danse est régi par les mêmes structures que le geste de qui écrit, lit, parle. Se convoque la relation du geste instrumental au texte, cette traduction d’un réseau signifiant à dé-chiffrer (un texte) en un autre réseau signifiant à agir (un autre texte). Lire et entendre pour donner à lire et donner à entendre. Comme pour la parole de Kleist, l’adage de Boileau se retourne ici aussi : c’est ce qui s’énonce clairement qui, alors, se conçoit bien. Le signifié (sens) et son maillage sont ici aussi conséquence d’un agir. Conséquence indispensable — nous sommes faits de sens, seconde pourtant. 

 

Alors que les temps présents nous somment au ressenti, à l’émotion totalisante, à sa sensationnelle fascination, la prévalence logique du signifiant, la dévaluation logique du sens et du ressenti (signifié), sont du registre de la perte, non sans déception dans la pratique professionnalisante. Elles révèlent une béance, un écart, que nous sommes toujours conviés à combler, à bourrer de sens. Cet écart, ce rien qui ne se comble d’aucun sens, est pourtant la condition de la parole, et, pour nous, celle de l’agir instrumental, vocal, scénique. Cet écart, ce décollement du sens et du ressenti tout-puissants, sont d’un certain coût : celui du prix à payer pour une énonciation acérée et vivante, la production d’un geste signifiant, adossé à une lecture. 

En un mot, une geste.

 

Cette proposition prendra la forme d’un labyrinthe. On ne pourra faire en effet l’économie d’un certain parcours, au risque d’un éloignement frisant le sentiment d’égarement. C’est à ce moment même qu’une sortie rectiligne se montrera, reliant bord et centre, faisant valoir l’ensemble et le fil qui l’aura guidé : celui de l’après-coup.

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